Entre la nonchalance et la confiance, l’ennui qu’elle anticipe et la volonté sans faille d’accomplir sa mission pour le bien des siens, de ses petits actuels à ces âmes qui ne le sont pas encore, il est difficile de vraiment lire ce que dégage Sybil en cet instant même. Son silence bien peu familier brisé seulement par le son de ses pas, son visage est neutre, fermé, les yeux cachés derrière ses lunettes fumées, qui observent tous ceux qui ne s’en doutent pas. Elle les a tous bien vu, ces impolis aux chaussures cirées, aux caméras prêtes à se pointer sur la moindre information qui n’existe pas, quitte à goinfrer le moindre passant des mots qu’ils veulent entendre pour le bien de leur carrière et leur carrière seule. Ils la dégoûtent.

À son grand regret, la mission ne consiste pas à pulvériser leurs outils sur le sol comme elle aime tant faire avec les paparazzis, ça lui mettrait presque la larme à l'œil. Presque. Elle reconnaît cependant leur utilité et devra s’en contenter, mais certes. S’ils ne se montrent pas utiles… non, non. Sybil s’en assurera. Quitte à casser bien plus que des caméras.

Mais il vaut mieux penser avec optimisme, non ? Oui, oui. Ils sont là pour que tout se passe bien.

Elle suit le groupe de près sans personne derrière elle, le regard posé sur à peu près tout en même temps, que ce soit ses alliés en face ou tous ces gens qui les fixent de tous les autres côtés, puis celle du petit monstre qui vient leur parler avant que la porte ne se referme. Loin de toutes ces distractions, Sybil prend le temps de bien observer - et écouter - les deux comparses qu’elle ne connaît pas.

La demoiselle semble stressée. Le petit semble terrifié. Prévisible. Peut-être que Sybil devrait avoir peur plus que ça pour la mission, mais elle ne connaît pas trop le concept. Ou alors c’est la présence de deux péchés d’un coup qui les dérange ? Possible aussi. Elle ne se verrait pas faire quoi que ce soit d’une telle importance sans lui, donc ils devront faire avec. Son regard croise celui de Paresse, brièvement - Oui. Ce ne pourrait être autrement.

Colère hausse cependant un sourcil.
Qui croit-elle être à donner des ordres à un péché ?

Une femme sûre d’elle qui sait ce qu’elle fait car elle connaît le milieu dans lequel ils sont, attribuant des rôles pour chacun afin que tous soient sur la même longueur d’onde ?? Woah ! Choquant ! Scandale ! Elle en connaît quelques-uns pour qui le fameux scandale aurait éclaté pour moins que ça. Sybil est pourtant amusée, vraiment. Ou attristée, elle n'est pas certaine.

Il faut du caractère dans le monde où elle vit. Qu’elle le garde précieusement.

Puis bon, c’était déjà prévu qu’elle soit garde du corps, ça ne devrait pas être si difficile. C’est juste un peu son métier, à la base… puis franchement, elle ne se verrait pas parler aux gens de la presse. Elle ne sait pas comment leur parler, elle n’aime pas leur parler, et saurait encore moins quoi leur dire. Elle jette un regard à Alexeï, qui lui… bon. Il est Alexeï quoi. Délicieuse ? Vraiment ? Elle secoue la tête et soupire. Typique Alexeï.

Elle se concentre alors sur l’autre. Sybil ne pourrait cependant pas associer cette même confiance en soi au petit. S’il pouvait disparaître dans le sol, elle est certaine qu’il le ferait, il est déjà à moitié en train de fondre sur le plancher de l'ascenseur. Alors qu’il croise son regard avec l’air de vouloir s’enfuir à la première fenêtre qu’il va croiser, le péché lui tape l’épaule, pas trop fort quand même pour éviter qu’il ne s’écrase par terre, se voulant encourageante.

- Garde le dos droit, p’tit gars. Ça ira.

Car soyons honnêtes, ce n'est vraiment pas le temps de devoir réanimer un p’tit monstre dans les couloirs car il s’est tapé une crise cardiaque avant même de parler à qui que ce soit. Elle ne sait pas trop ce qu’il fait ici, mais il faut avoir confiance, sans quoi, le plan a déjà échoué. Et il ne faut PAS que le plan échoue. Non non non. Pour ses petits. Pour les monstres.

D’un mouvement rapide, elle replace les lunettes sur son nez et l'hiver sur ses prunelles, sortant de l'ascenseur en dernier.

Que le spectacle commence.